Lizeth Osuna, Curation et production d’expositions 

Curation et production des expositions

Quintessence, celui que je veux être

Exposition collective avec l’artiste franco-péruvienne Claudia Rivera, et les artistes colombiens Juan Pablo Echeverri, Felipe Lozano et Eduardo José Rubio Parra.

Quintessence interroge l’essence pure et fondamentale ainsi que l’amplification¹ de soi-même et de son identité. Cette introspection permet à l’individu de se distinguer et de se reconnaître, tout en créant des liens et en participant à la création collective.

À travers des vidéos, des installations, des dessins et des photographies, ces artistes questionnent le potentiel de devenir celui·celle·iel qu’iel veut être, de jouer avec son apparence et d’enquêter sur une identité façonnée par des forces extérieures, qu’elles soient sociales, politiques ou technologiques. Leur travail révèle une tension entre l’individu et ce qu’il souhaite devenir, explorant l’autoreprésentation, la transformation de l’apparence et la réappropriation des héritages culturels dans une époque où les identités sont en constante évolution, plurielles et diverses.

Les artistes ont des pratiques et des inspirations variées, allant des figures pop latino-américaines, des récits familiaux, des esthétiques queer à l’intelligence artificielle. Dans un monde saturé d’images, de récits et de normes contradictoires, la quête de soi devient un acte de résistance, un mouvement continu de reconfiguration. Tous partagent une volonté de brouiller les frontières entre soi et l’autre, entre les normes établies et leurs détournements. Face à une société qui valorise les identités figées, normées et performatives, leurs œuvres ouvrent des espaces de liberté, de jeu et d’indétermination.

Cette exposition naît avec l’objectif de contribuer, même modestement, à la promotion de l’art latino-américain et de sa diaspora en France, en offrant des propositions engagées, riches et pertinentes, loin des clichés tropicalistes souvent associés à cette vaste région du Sud global.

¹ D’après Gilbert Simondon, l’amplification désigne le processus par lequel l’individu, une fois individué, cherche à développer et étendre ses capacités, à la fois intérieurement et dans ses interactions avec le monde, en transformant et enrichissant constamment son environnement. Dans « L’individuation à la lumière des notions de forme et d’information » (1964).

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Les Artistes

Felipe Lozano(1994,  Bogota – Colombie)Artiste visuel basé à Bogotá. Son travail part souvent d’images obsessionnelles, de contradictions ou d’éléments intimes difficiles à formuler avec des mots. Il développe une pratique hybride, entre vidéo, installation, dessin, intelligence artificielle ou matériaux biomédicaux, en lien avec des questions autour du corps, du désir, de la mémoire et des technologies qui nous traversent.

Né par fécondation in vitro et marqué par une histoire dans laquelle il a absorbé son jumeau in utero, il aborde le corps comme un territoire instable, entre le naturel et l’artificiel, l’individuel et le multiple. Il s’intéresse à la manière dont nos identités sont construites par des systèmes affectifs, politiques, scientifiques et culturels.

Dans un monde saturé d’images, Felipe utilise également les réseaux sociaux comme un espace de recherche. Il y confronte la visibilité, l’hyperexposition des corps, notre besoin d’appartenance, d’être vus, d’exister dans le regard de l’autre. Ces plateformes deviennent pour lui un miroir collectif chargé de tensions affectives et symboliques, qui permet à chacun d’être celui ou celle qu’il souhaite montrer.

Juan Pablo Echeverri

Juan Pablo Echeverri (1978-2022, Bogota Colombie) C’était un artiste visuel qui explorait l’identité et l’autoreprésentation sous un angle large et complexe. Sa pratique, que l’on pourrait qualifier de « multi-identité » obsessionnelle, ludique et nourrie par l’imaginaire pop, s’étendait de sa collection d’objets dans l’intimité de son foyer à ses créations artistiques les plus connues. Il travaillait principalement avec la photographie et la vidéo pour questionner les stéréotypes et jouer avec sa propre apparence.

Dans sa série la plus vaste, Miss Fotojapón, il a réalisé des autoportraits quotidiens pendant plus de vingt ans, montrant à quel point l’identité peut être changeante, construite, performative et rituelle. Dans ses vidéos, enregistrées lors de ses voyages, il imitait des chansons populaires du lieu visité comme une manière de se refléter dans la culture de l’autre, transformant son rôle d’artiste en celui d’un accumulateur de souvenirs.

Son œuvre, à la fois intime et universelle, continue de nous inviter à nous interroger : Qui voulons-nous être ?

Claudia Rivera (1999, France – Pérou) Artiste autodidacte franco-péruvienne, née à Paris de parents péruviens exilés dans les années 1990. Elle a fait de son expérience entre deux continents un axe central de sa pratique artistique. Claudia a récemment créé son agence Amaruagencie où, comme dans son travail artistique, elle explore l’identité et l’esthétique latino-américaine comme des outils pour se reconnecter à ses racines et renforcer le sentiment de communauté. Sa pratique, profondément nourrie par son vécu entre deux cultures et par son engagement social, se manifeste dans le tissu collectif qu’elle tisse à travers des événements et des espaces de rencontre à Paris.

En tant qu’artiste, elle travaille principalement avec la photographie et le portrait pour rendre visible la diversité des corps, des visages et des parcours qui composent l’identité des femmes latino-américaines. Dans sa série Ñañaykuna, Rivera capture avec sensibilité et force des femmes d’origines, d’âges et d’horizons variés, en remettant en question les stéréotypes de genre, l’hypersexualisation et les représentations associées à la latinidad en Europe. À travers cette série, l’identité apparaît comme multiple, affective et ancrée à la fois dans la mémoire et dans la résistance.

Dans sa pratique photographique, de direction, d’accompagnement et de production artistique, Claudia propose un espace bienveillant où la communauté latino-américaine et sa diaspora peuvent s’autoriser à être ce qu’elles souhaitent être.

Eduardo José Rubio Parra (1994, Cali – Colombie, vit et travaille à Anvers) Développe une pratique centrée sur le dessin au graphite et l’autoportrait photographique, à travers lesquels il explore différentes versions imaginées de lui-même. En incarnant de multiples personnages, Rubio Parra utilise son corps comme médium pour interroger des thèmes tels que la mort, le surnaturel, la spiritualité et l’inconnu.

Son œuvre naît d’un dialogue entre les traditions religieuses vivantes de sa Colombie natale et les récits mythiques et superstitieux européens, qui traversent son expérience de vie entre les cultures. Par l’autoreprésentation, Rubio Parra invite à une réflexion sur l’identité en tant que processus fluide et en perpétuelle négociation. Ses œuvres révèlent une expérimentation constante avec son apparence, ainsi que le pouvoir transformateur de l’art, qui lui permet de donner forme et de matérialiser ce qu’il n’a pas pu manifester dans sa vie quotidienne, se permettant ainsi de devenir « celui qu’il veut être ».

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